Ki Tetse 5782

“... et tu élimineras le mal d’Israel.”
Devarim 22,22


La paracha de la semaine, la seconde du mois de Eloul, c’est Ki Tetse. La paracha commence par réglementer le comportement des hommes qui partent en guerre : “Quand tu sortiras pour la guerre contre tes ennemis …”.
J’en profite pour rappeler qu’il est toujours plus facile de voir les travers de mon ennemi. Mais en ce mois de préparation à Roch Hachana et aux fêtes de Tichri, souvenons-nous que notre premier ennemi c’est nous même. Si je ne m’intéresse qu’aux défauts des autres, jamais je ne grandirai. Si j’exige de l’autre d’être parfait, c’est parce que j’ai une trop haute idée de moi. En demandant à l’autre d’être parfait avec moi, je lui dis en fait, moi je suis parfait, je ne dois pas évoluer, toi en revanche, tu as du chemin à faire.


La remise en question est quelque chose de personnel. Avant de corriger les autres, je dois d’abord me corriger.


Vendredi soir dernier, le Rav a parlé entre autres, du Zaken Mamré, le vieux sage qui se révolte et s’oppose à ses pairs. A ce titre, il s’est intéressé au Meche’h ‘Ho’hma sur le verset en entête (de notre paracha ki tetse), que je vais tenter de vous rapporter ici.


Le verset en entête constitue la fin du verset qui présente la femme adultère avec son amant. La Torah nous demande “Tu élimineras le mal d’Israel”.

A noter, les peines de mort de la Torah ne sont pas appliquées. Le Talmud, dit qu’un tribunal qui condamne à mort une fois en 70 ans est qualifié de tribunal meurtrier. En revanche, ce qui est clair, c’est qu’un interdit auquel on adjoint une peine de mort, est un interdit grave, dont la Torah veut nous éloigner.


Le Meche’h ‘Ho’hma s’étonne sur notre verset. Souvent la Torah nous dit “Et tu élimineras le mal qui est parmi toi”, et cette fois ci la Torah nous dit “ Tu élimineras le mal d’Israel”.
Il explique que lorsque la Torah utilise “tu élimineras le mal qui est PARMI TOI”, c’est pour des lois qui ne concernent pas les non juifs qui résident avec nous en terre sainte. Ainsi, les lois de la jeune fille fiancée, la loi du fils rebelle, ne concernent pas les non juifs. La Torah utilise donc “tu élimineras le mal qui est PARMI TOI”.


La Torah ne me demande pas de juger les non-juifs qui résident en Israel, à ce sujet, tout simplement parce qu’ils ne sont pas concernés par ces lois.
Pour d’autres lois, la Torah précise “ Tu élimineras le mal d’Israel”. Et là, ce sont des lois qui concernent aussi les non juifs. A titre d’exemple, l’adultère est aussi un interdit pour les non-juifs. Le Meche’h Ho’hma explique que la Torah ne veut pas que nous jugions les non juifs d’Israel, c’est pourquoi elle dit “Tu élimineras le mal d’Israel”. Comme le dit le Rambam, nous avons l’obligation, en Israel, de faire respecter la justice, et de contribuer à établir des tribunaux pour les non juifs. Mais ce ne seront pas des juifs qui jugeront. Même si les non juifs enfreignent des interdits, dans un pays régi par la loi de la Torah, ils seront jugés par des non juifs.

On comprend ici toute la clairvoyance de nos sages. En évitant que le citoyen juge l’étranger, on évite beaucoup d’iniquités.
 

Le Meche’h Ho’hma a donc donné une explication qui semble tenir. Pourtant, il y a au moins une exception à sa règle : pourquoi pour le sage rebelle, la Torah a-t-elle dit “Tu élimineras le mal d’Israel”? Cette loi ne concerne que les juifs, pour être cohérent, on aurait dû lire “tu élimineras le mal qui est PARMI TOI” !

Le Meche’h Ho’hma explique donc là, que la Torah a voulu parler d’Israel à propos du sage rebelle pour nous faire comprendre un point essentiel.
Lorsqu’un sage se lève, et s’oppose à ses pairs, c’est très risqué. Il met en danger l’unité de la nation. Cela risque de créer plusieurs Torah, plusieurs factions. Ce sage ne s’oppose pas simplement à ses pairs, ou au tribunal qui va le juger. Ce sage rebelle n’offense pas des personnes. Dans un tel cas, les offensés auraient pu pardonner.
Ce rebelle remet en cause le ciment du peuple. Il bafoue l’honneur de la nation. Et cela est impardonnable car c’est la survie du peuple qui est question.

Le Meche’h Ho’hma termine en précisant que cette volonté de s’opposer à ses pairs peut provenir du profond désir d’innover, de renouveler. Cette Taava, cette envie malsaine, D. nous en préserve, pousse l’homme à se séparer du peuple d’Israel.


Chabbat Chalom
Stéphane Haim COHEN